Roslund et Hellstrom

Box 21
L'honneur d'Edward Finnegan

Box 21

JH (juin 2011)


En un coup d'oeil

  • Date de publication : 2005.
  • Date de l'édition française: 2010 (Presses de la Cité, 368p).
  • Genre: roman noir.
  • Mots-clés: prostitution, trafic d'êtres humains, dilemme moral.
  • Personnages principaux: Ewert Grens et Sven Sundkvist, inspecteurs de police à Stockholm
  • Quatrième de couverture: ici.
  • Commentaire : .

À mon avis

Ce tandem d'auteurs suédois a déjà écrit plusieurs romans policiers, dont un seul autre a déjà été traduit en français: La bête, que je vais certainement aller lire, encouragé par la qualité de ce Box 21.

Une prostituée lituanienne en exil, tenue en esclavage par un salopard, est sauvée in extrémis par la police suédoise. Mais, rendue à l'hôpital, elle prend cinq médecins en otage et menace de faire sauter le bâtiment. Pendant ce temps, une petite frappe mafieuse vient au même hôpital régler le compte d'un petit pusher pas réglo; l'ennui: un médecin l'a vu.

Les deux enquêtes sont confiées aux inspecteurs Grens et Sundkvist. Curieusement, elle ne se recouperont jamais. Mais elles éclairent sous deux jours différents la psychologie des deux enquêteurs.

Ce roman a des visées sociales: décrire de l'intérieur, avec une intensité à la fois sobre et poignante, l'enfer vécu par les nombreuses prostituées d'Europe de l'Est mises en esclavage par des trafiquants d'êtres humains. Le sujet, sociologiquement, n'est pas neuf. Mais les auteurs le traitent avec une efficacité remarquable, dont, comme le dit l'éditeur, on ne sort pas indemne.

Cela dit, je ne déflore pas l'intrigue en vous disant que la prostituée en question se suicide au milieu du roman. Que reste-t-il pour la seconde moitié? Un immense dilemme moral pour les deux flics qui doivent faire un choix entre laisser tue la vérité d'une morte et ruiner la vie d'une femme et d'enfants bien vivants. Toute l'intensité dramatique de ce roman provient du fait que les deux flics, pourtant collègues et amis, font des choix diamétralement opposés face à ce dilemme. Où est la justice? Dans la vérité ou dans la compassion? Que faire quand vérité et compassion s'opposent?

La résolution finale de ce dilemme est d'une rare maîtrise, dont la guimauve hollywodienne est totalement absente. Et le punch dévastateur, je ne vous dis que ça, situé dans l'avant-dernière phrase du roman (non, n'allez surtout pas voir!), même si on le devine quelques pages d'avance, vous laisse néanmoins sonné, comme par un direct au plexus. Comme le disait je ne sais plus qui, la meilleure façon de trouver justice en ce bas monde demeure encore d'ouvrir le dictionnaire à la lettre J. Roman noir, je vous disais ...

Ma note: 5/5 et Coup de coeur.


Box 21
L'honneur d'Edward Finnegan

L'honneur d'Edward Finnegan

JH (janvier 2012)


En un coup d'oeil

  • Date de publication : 2006.
  • Date de l'édition française: 2011 (Presses de la Cité, 452p).
  • Genre: polar social.
  • Mots-clés: peine de mort, vengeance.
  • Personnages principaux: Ewert Grens et Sven Sundkvist, inspecteurs de police à Stockholm
  • Résumé: sur l'Indépendant..
  • Commentaire (fort pertinent) : sur Blue Moon.

À mon avis

Troisième roman de ce tandem d'auteurs suédois, ce polar confirme les visées sociales des auteurs. Ici, c'est la peine de mort qui est le thème central; et ils frappent fort. Ce roman pourrait bien devenir le polar de référence sur la peine de mort, tout comme l'est le film La dernière marche, de Sean Penn avec l'oscarisée Susan Sarandon. Mais sur un registre différent. Alors que le film portait essentiellement sur la rédemption, ce roman s'attarde plutôt sur la machine judiciaire et politique mise en branle pour exécuter un innocent.

John Schwartz attend son exécution dans le couloir de la mort d'une prison de l'Ohio, suite au meurtre de sa petite amie, dont je ne vous révélerai rien en vous disant qu'il en est innocent. Mais son exécution fait l'affaire de tout le monde, au premier titre celle du père de la victime, Edward Finnegan, animé par une haine d'autant plus implacable qu'il est l'adjoint du gouverneur de l'État. L'ennui, c'est qu'il est privé de sa vengeance par la mort naturelle du condamné, quelques mois avant son exécution.

Mort? Finalement non. Grâce à un plan minutieux et machiavélique que je vous laisse découvrir, il parvient à s'échapper de la prison et refait sa vie sous une autre identité en Suède. Une banale altercation, quelques années plus tard, le met entre les mains de l'inspecteur Grens (de plus en plus dépressif!) et dévoile le stratagème. Là où tout se complique, c'est que les États-Unis réclament son extradition pour l'exécuter, même si la Suède a signé, depuis, un accord international interdisant l'extradition de criminels qui risquent la condamnation à mort dans leur pays d'origine. Et les magouilles politiques commencent ...

Passionnant et percutant, l'ouvrage n'est toutefois pas totalement maîtrisé sur le plan romanesque. Il faut d'abord traverser le premier quart du roman avant de stabiliser l'intrigue et de commencer à y voir clair. Jusque là, on a l'impression que les auteurs ont écrit leurs premiers chapitres sur des cartes à jouer, qu'ils ont copieusement battu le paquet et nous les ont données à lire en ordre dispersé. Toutefois, une fois les choses mises en place, la machine baigne dans l'huile et se déploie avec une rigueur glacée jusqu'à la finale, encore une fois totalement inattendue et en forme de punch au plexus.

C'est mon autre réserve: la finale. Brillante sur le plan polar, malgré une légère invraisemblance, elle pose de très sérieux problèmes sur le plan moral, au point d'ébranler la crédibilité du commentaire social. On aime ou on n'aime pas. Personnellement, je suis ambivalent ...

Il reste que c'est un polar nettement au-dessus de la moyenne. Un meilleur travail d'édition et un peu d'élagage en auraient fait une réussite absolue, mais cela demeure un roman très fort, à recommander sans hésitation. Ce tandem suédois est à surveiller attentivement: par la force de leur propos, les auteurs tranchent sur la grisaille maintenant convenue du polar scandinave.

Ma note: 4,5 / 5

Box 21
L'honneur d'Edward Finnegan