Le club des polarophiles québécois

L'heure trouble (de Johan Theorin)

MD (juin 2012)


En un coup d'oeil


À mon avis

Un Suédois de la nouvelle génération : journaliste le jour, Johan Theorin a pris 5 ans pour écrire, le soir, L'Heure trouble, en dépit des protestations de sa femme et de sa fille. Et ce premier roman a obtenu le prix du meilleur roman policier suédois 2007, octroyé par l'Académie suédoise du crime.

C'est un auteur qui a du souffle et qui, conscient du caractère éventuellement international de son roman, a la bonne idée de simplifier le nom de ses personnages : Gerlof, Julia, Kant, Astrid, Lena, Lennart, Ernst, John… bref, le lecteur n'aura pas l'impression de visiter une autre planète et ne fournira pas un effort, habituellement vain, pour retenir tous les noms. Roman d'ambiance où l'aspect géographique a son importance, l'action se situe surtout sur l'île d'Öland, dans les brumes de la Baltique, dont le caractère sauvage sera progressivement civilisé par les spéculateurs et les pionniers modernes de la construction. De la même façon, le lecteur se promène des années 40 aux années 90 : d'une histoire du terroir mystérieuse à des événements actuels de facture plus classique.

Il est certain que l'auteur aime raconter son histoire, inventer des relations qu'il aurait pu vivre, utiliser des légendes transmises par les traditions orales, nous présenter des personnages bien de chez lui. C'est presque accidentellement que ce roman est devenu policier. D'ailleurs, ce n'est pas le policier qui fait l'enquête : bien au contraire, il tente d'empêcher le vieux Gerlof et sa fille de poursuivre leurs propres recherches pour savoir ce qui est arrivé au jeune fils de Julia, le petit Jens. Ces recherches font partie de leur vie quotidienne et ne suivent pas les procédures officielles d'enquête. Vers la fin, une trentaine de pages se qualifieraient de suspense. Mais, dans l'ensemble, c'est plutôt un roman d'atmosphère noire et brumeuse.

L'auteur utilise un processus qui me lasse : le va-et-vient continuel entre plusieurs moments différents dans le temps et même dans l'espace. Comme si les feuilles du manuscrit avaient été éparpillées par un coup de vent et rassemblées de façon discontinue : 1972, 1992 (environ, car ce n'est pas spécifié), 1936, 1992 (environ, parce que non spécifié), 1940, 1943, 1945, et je pourrais continuer encore pendant quelques lignes. La plupart du temps, ce procédé m'ennuie et me semble artificiel, comme si on voulait injecter un certain déséquilibre, donc une sorte de dynamisme, dans une histoire banale en elle-même. Chez Theorin, les bouts de fil se rejoignent. Et les problèmes se résolvent. Mais, rendu là, j'avais un peu perdu de l'intérêt.

Ma note: 3,5 / 5