Le club des polarophiles québécois

Rage de dents (de William Lashner)

JH (juin 2009)


En un coup d'oeil

  • Date de publication originale: 2005 (Falls The Shadow)
  • Date de l'édition française: 2006 (éd. du Rocher) et 2008 (Folio policiers)
  • Genre(s): roman d'enquête, polar judiciaire.
  • Mots-clés: séduction, vengeance, enfant maltraité.
  • Personnage principal: Victor Carl, avocat de la défense à Philadelphie; Dr Bob, dentiste.

À mon avis

William Lashner, qui a lui-même fait carrière d'avocat à Philadelphie avant de se consacrer à l'écriture et son héros récurrent est l'avocat Victor Carl, vedette de sept romans à ce jour. Rage de dents est le cinquième. Lashner a fait une entrée en force dans le genre avec Les prévaricateurs, en 1995. Parmi ses bons titres suivants, notons Vice de forme (2003) et Dette de sang (2005).

Même si on range habituellement Lashner dans les auteurs de polars judiciaires, les scènes de procès ne tiennent qu'une place congrue dans ses romans. On y trouvera des performances brillantes en cour, mais l'essentiel n'est pas là. L'essentiel, c'est le personnage de Victor Carl, avocat qui rêvait d'une grande carrière et qui se ramasse à vivoter dans son petit bureau, en défendant habituellement des crapules. Froussard, égoïste, cynique et lâche, son sens moral est douteux et la culpabilité ou non de ses clients le préoccupe fort peu; ce qui compte c'est leur capacité de verser un acompte! Associé à Beth Derringer, son amie de toujours, idéaliste qui lui sert de conscience morale, il finit toujours par être entraîné malgré lui dans des situations où il doit agir pour des raisons morales, alors qu'il n'en a rien à cirer. Mais comme il est tenace et intelligent, il réagit efficacement quand on le piège ou quand on le prend pour un imbécile.

Rage de dents commence quand Carl accepte d'aider un client, déjà condamné pour le meurtre de sa femme (dont il jure être innocent), à obtenir un nouveau procès. Parallèlement, il doit, pro bono représenter les intérêts d'un petit garçon que l'on soupçonne être victime de mauvais traitements de la part de ses parents. À partir de ces deux intrigues qui se poursuivent tout au long du roman sans jamais se rencontrer, Lashner introduit une série de personnages bien campés, profondément humains et complexes, qui constituent, avec l'écriture fine et nerveuse de Lashner, l'essentiel du roman. Il y a un excellent résumé critique de ce roman sur Pol'Art Noir.

Contrairement à Margolin ou Martini, on ne lit pas Lashner d'abord pour l'intrigue ou pour les scènes de procès, même si elles sont correctement écrites. On le lit pour ses personnages (et au premier titre Victor, curieux anti-héros qu'on ne réussit pas à trouver antipathique) et pour son style, brillant, et plein d'humour. Et on le lit aussi pour cette vision cynique du système judiciaire et social, qui reste malgré tout teintée d'un souci de décence et d'humanité, comme une petite fleur entêtée dans la jungle. L'intérêt de l'univers que réussit à construire ainsi Lashner réussit facilement à faire pardonner certaines longueurs.

Ma note: 4/5


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