Le club des polarophiles québécois

Le polar québécois: mes recommandations

MD (mars 2009)


Quelques pistes fraîches

Maintenant que vous disposez de certaines armes pour vous débrouiller efficacement, encore faut-il vaincre le préjugé de la médiocrité des polars québécois comparés aux plus grands anglo-américains, français et scandinaves. Pour ce faire, l'attaque sera plus risquée mais plus directe : voici quelques arguments sous forme de romans qui devraient vous convaincre. J'ai choisi des auteurs québécois même s'ils publient en France ou en Ontario, et des auteurs francophones qui ont vécu et publié au Québec même s'ils demeurent aujourd'hui à l'étranger. Je m'en tiens aussi à des écrivains qui ont publié au moins deux polars, dont un depuis 10 ans; j'ai parfois brisé cette règle quand un jeune auteur prometteur n'avait publié qu'un seul roman. Pour des informations supplémentaires sur la biographie et la bibliographie de ces auteurs, consultez les deux sites internet mentionnés plus haut. Souvent les auteurs ont leur propre site. Si j'en ai oublié quelques-uns encore meilleurs, que les éditeurs me fassent parvenir leurs livres plutôt que leurs reproches.

Les niches actuelles du polar se définissent assez bien, mais ce n'est pas aussi facile d'y faire entrer quelqu'un parfaitement. Et certains romanciers aiment bien changer de genre de temps en temps. Malgré tout, ça reste vrai qu'on n'est pas dans le même monde quand on lit Pelletier, puis Senécal, ou Houde, puis Bouthillette.


Le polar noir

Pour le moment, le maître du polar noir au Québec, c'est Patrick Senécal. On peut s'amuser à le comparer à Stephen King, au sens où ceux qui aiment King devraient aimer Senécal, bien que ce dernier situe ses drames d'horreur dans un contexte de critique sociale ironique très réaliste. Mise en garde : les récits de Senécal sont horribles, bien sûr, mais certains relèvent plus du fantastique que du polar à proprement parler. Dans un polar, la solution de l'énigme est rationnelle. Dans le fantastique, la tension demeure à la fin et la solution admet le recours au parapsychologique ou à d'autres formes d'irrationalisme (la migration des âmes, par exemple, est populaire de ce temps-ci). Regardez donc où vous mettez les pieds.

Pas aussi noir mais un pied aussi dans le fantastique, Joël Champetier, qui écrit aussi beaucoup pour la jeunesse, a commis deux romans pour adultes où se mêlent le fantastique, l'enquête et le suspense. Je le recommande aux amateurs de polars qui ont soudain une fringale de fantaisie.

Luc Baranger est difficile à cerner. C'est peut-être le plus américain des Français. On pourrait le prendre pour un personnage de road movie. Les amateurs de polars américains ne seront pas dépaysés. Traducteur du dernier Anne Perry : Buckingham Palace Gardens.

Le journaliste Benoît Dutrizac est connu pour ses coups de gueule. C'est un homme de métier qui échappe au politiquement correct et il en est fier. Son énergie virulente colore aussi ses polars pour le plaisir des uns et l'agacement des autres.

Pas certain que le dernier roman de Laurent Chabin est un polar noir mais, en tout cas, c'est noir. Le lecteur est dérouté, écœuré ou convaincu.

Encore trop jeune pour prendre sa retraite, François Landry écrit relativement peu et tire depuis une quinzaine d'années dans bien des directions. Son récent polar, Moonshine, n'est pas passé inaperçu : hommage à Poe, qu'il aimait bien dans sa jeunesse?

Mes recommandations
Patrick Senécal Le vide (Alire, 2007)
Joël Champetier La mémoire du lac (Alire, 2001)
Luc Baranger La balade des épavistes (Alire, 2006)
Benoît Dutrizac Kafka Kalmar, crois ou crève (Les Intouchables, 2008)
Laurent Chabin Écran total (Triptyque, 2006)
François Landry Moonshine (La Courte Échelle, 2007)

Le pol'art

C'est la façon de désigner des romans policiers à forte teneur d'ingrédients artistiques, le plus souvent la littérature et la peinture. C'est un genre risqué dans la mesure où la dimension artistique relègue parfois l'intrigue au second plan; mais les polarophiles en herbe, qui craignent le pur divertissement dispensé par un polar classique, hésitent moins à se lancer à l'abordage d'un de ces romans. Poète et littéraire italien qui a passé 30 ans au Québec et vit maintenant en France, Fulvio Caccia a écrit une trilogie à saveur littéraire, dont le troisième tome, relativement indépendant, a été bien accueilli par les critiques.

Original par ses thèmes comme par son écriture, Benoît Bouthillette vient d'écrire un deuxième roman (La mue du serpent de terre) qui remet en scène son enquêteur montagnais aux méthodes peu orthodoxes, Benjamin Sioui. Dans son premier roman, prix de Saint-Pacôme 2005, sévit un tueur en série qui s'inspire des toiles de Francis Bacon. Aucun rapport avec le film Anamorph de Henry S Miller (2007), dont le tueur s'inspire aussi de Bacon.

Mes recommandations
Fulvio Caccia Le secret (Triptyque, 2006)
Benoît Bouthillette La trace de l'escargot (JCL, 2005)

Le polar cynique ou satirique

Nous avons tous eu du plaisir, je crois, à lire de temps en temps un San-Antonio ou un Exbrayat. Les auteurs qui suivent ne les imitent pas mais chacun à sa façon nous incite à rire, à sourire ou à grincer des dents, sans que, pour autant, la trame policière soit réduite au prétexte. Écrivain d'expérience, François Barcelo est le premier québécois qui arrive à se faire publier au Masque (Gallimard). Son roman Cadavres vient d'être porté à l'écran. Humour grinçant garanti.

Sylvain Meunier, dans son quatrième polar qui lui vaut le Prix Saint-Pacôme 2008, révèle ce qui se cache derrière la décapitation d'un sportif à temps partiel par une balle de golf explosive qui porte la signature de Jean Chrétien. Ça vous rappelle quelque chose?

C'est à travers une critique sociale débridée que Nando Michaud récidive : son journaliste-détective François Langlois enquête sur le meurtre d'une femme victime d'un tampon hygiénique piégé : encore pire qu'une balle de golf!

Michel Châteauneuf, avec un seul polar, s'est fait la réputation d'un iconoclaste qui tire sur tout ce qui bouge; on pourrait croire qu'il se donne la partie facile en rassemblant pour une même balade des Hell's Angels, un psychopathe nécrophile, une naine infanticide, et un enquêteur pédophile : peu commun en tout cas.

Mes recommandations
François Barcelo Chroniques de Saint-Placide-de-Ramsay (Fayard, 2007)
Sylvain Meunier L'homme qui détestait le golf (La Courte Échelle, 2008)
Nando Michaud La guerre des sexes ou... (Triptyque, 2006)
Michel Châteauneuf La balade des tordus (Veuve Noire, 2006)

Le polar d'enquête

Cette catégorie est plus large que celle de procédure policière; l'enquêteur peut être un policier, mais aussi un détective, un journaliste, un simple particulier empêtré bien malgré lui dans une situation menaçante qu'il s'efforce de comprendre. La forme de ces romans est connue; les contextes, les atmosphères, les types de personnages, les rythmes, les écritures marquent la différence. A tout seigneur, tout honneur : la sympathique Chrystine Brouillet et sa détective Maud Graham ont gagné un fidèle public au roman policier québécois depuis plus de vingt ans. Le contraste entre les crimes affreux et la belle et paisible ville de Québec est saisissant. Brouillet écrit beaucoup; son oeuvre est inégale; mais elle a réussi des polars classiques irrésistibles.

L'inspecteur Duval de Jacques Côté travaille aussi à Québec et dans les environs. Côté est inventif au niveau de l'intrigue, mais ses personnages et ses paysages sont ancrés dans la réalité québécoise de la fin des années 70/début 80. Bien documentés, ses romans captivent par leur réalisme.

Montréal connaît aussi sa part de crimes : Maxime Houde, sans doute influencé par les classiques américains, situe ses drames à la fin des années 40 et décrit les hauts et les bas du privé Stan Coveleski. Ses romans ne sont pas tous convaincants, mais il n'a pas encore 40 ans, âge d'éclosion de beaucoup d'auteurs que j'apprécie.

En un sens, les romans de Claude Belcourt se passent aussi à Montréal mais, plus précisément, dans la tête des principaux personnages sous la forme de monologues intérieurs.

Déconcertant et original. Claude Forand, dans un deuxième polar qui se lit bien, revient avec l'inspecteur Roméo Dubuc, chef de police de Chesterville, un coin perdu du Québec, dans lequel il ne se passe pas habituellement grand chose sauf que, quand quelque chose d'inhabituel arrive, c'est gros.

Ceux qui se souviennent des excellents documentaires de Laurent Laplante peuvent maintenant le lire, à défaut de le voir. Ses quatre polars n'ont pas fait l'unanimité. Le premier remporta le Prix Saint-Pacôme, Spehner préfère le deuxième, plusieurs préfèrent le dernier. Je ne les ai malheureusement pas lus : prenez une chance! Ça ne doit manquer ni d'application ni d'intelligence.

Les plus âgés d'entre vous qui vous ennuyez des deux polars de Monique Lepage publiés il y a plus de 25 ans, et qui tournaient autour des enquêtes d'Onésime Gagnon, journaliste à Police-Hebdo, retrouveront avec plaisir leur héros, maintenant retraité, et qui enquête justement dans une maison de retraite. L'auteure s'appelle maintenant Monique Le Maner.

Dans un style très différent, Anne-Michèle Lévesque, très impliquée dans le milieu littéraire et artistique de l'Abitibi, écrivaine impénitente, vient de publier un cinquième polar qui décrit la vie quotidienne d'un groupe de policiers qui mènent de front trois ou quatre enquêtes dans leur petite ville : un vrai document sociologique.

Robert Malacci, plus décontracté, s'incarne lui-même en un photographe-journaliste qui a le don, comme dirait l'autre, de se fourrer le nez dans les plats! Thématiques connues, mais écriture singulière.

Les romans de Jean Lemieux se passent aux Îles de la Madeleine où il a vécu et pratiqué la médecine avant de s'établir à Québec. Un décor bien campé et des personnages étoffés n'enlèvent rien à des intrigues bien ficelées; quand le sergent Surprenant mène l'enquête, les criminels doivent se méfier.

Plusieurs autres auteurs n'ont écrit qu'un roman policier mais semblent prometteurs : celui de Marie Laberge a été reçu de façon hétérogène car, pour plusieurs, la beauté de l'écriture ne parvient pas à racheter une centaine de pages de trop qui ralentiraient le rythme. Je veux bien, mais j'espère que cela n'empêchera pas l'auteure de récidiver. Les critiques ont souvent la dent dure pour un auteur bien établi dans un domaine autre que policier.

Peu connu, au contraire, le lauréat du Prix Arthur-Ellis 2006, Gérard Galarneau, n'a pas convaincu tout le monde avec son premier roman. Je l'incorpore quand même dans cette liste des meilleurs auteurs, à cause du Prix Arthur-Ellis, quitte à le faire disparaître après avoir lu Motel Riviera.

Pierre Saint-Arnaud Caron, directeur littéraire des éditions Fides, a beaucoup publié mais vient de commettre son premier polar, classé par Spehner dans les biblio-mysteries. Les amateurs ont été satisfaits et attendent le deuxième avec avidité.

Un dernier, enfin, mais non le moindre, Michel Bergeron (pas celui du hockey) a écrit quelque chose d'apparemment assez unique, qui a fasciné ceux qui l'ont lu, et passablement intrigué ceux qui ne l'ont pas encore lu, parce que ceux qui l'ont lu ne peuvent pas en parler.

Mes recommandations
Chrystine Brouillet Le collectionneur (La Courte Échelle, 1995)
Jacques Côté Le chemin des brumes (Alire, 2008)
Maxime Houde Le salaire de la honte (Alire, 2003)
Claude Belcourt Le grand baveux (Trait d'union, 2000)
Claude Forand Ainsi parle le saigneur (David (Ottawa), 2006)
Laurent Laplante Vengeances croisées (JCL, 2006)
Monique Le Maner La dernière enquête (Triptyque, 2008)
Anne-Michèle Lévesque Crapules & cie ( Éditions Z'ailées, 2008)
Robert Malacci Lames sœurs (Alire, 1997)
Jean Lemieux On finit toujours par payer (La Courte Échelle, 2003)
Marie Laberge Sans rien ni personne (Boréal, 2007)
Gérard Galarneau Motel Riviera (JCL, 2005)
Pierre Saint-Arnaud - Caron Letendre et l'homme de rien (Fides, 2008)
Michel Bergeron L'homme de neige (JCL, 2006)

Le suspense

Dans le suspense, le lecteur a tendance à s'identifier à la victime et à partager son angoisse. C'est moins l'accumulation des événements extérieurs qui nous tombe dessus, que l'infiltration d'un sentiment de perdition qui nous gruge par en dedans. Hélène Desjardins a publié deux polars, dont le deuxième est nettement un suspense, bien construit et captivant.

C'est surtout par des recueils de nouvelles noires que s'est fait connaître André Marois, ce qui ne l'a pas empêché d'écrire un suspense particulièrement déconcertant.

Éditorialiste au Quotidien de Chicoutimi, Carol Néron, 14 ans après, se lance dans une sorte de suite à Rosalie. Certains se sont demandé, et c'est souvent le problème dans un suspense, si l'auteur faisait exprès pour allonger la sauce. Ce qui n'empêche pas la recette d'être efficace.

Mes recommandations
Hélène Desjardins Le Dernier roman (La Courte Échelle, 2001)
André Marois Accidents de parcours (La Courte Échelle, 1999)
Carol Néron Rebecca (JCL, 2003)

Le thriller

Forme de roman très populaire ici et ailleurs, le thriller est devenu une catégorie plutôt fourre-tout, pourvu que l'action y règne et que le lecteur soit bousculé par une tornade de rebondissements. Selon le contexte dominant, on le qualifiera de juridique, politique, médical, psychiatrique, historique (cf. Les niches actuelles du roman policier). En réalité, plusieurs de ces dimensions sont souvent présentes dans un polar. La classification suivante sera donc prise avec un grain de sel... et un scotch. Nombreux sont nos écrivains qui s'inscrivent dans la mouvance thriller international/politique/espionnage, dont le grand maître est indubitablement Jean-Jacques Pelletier, l'auteur qui me donne actuellement le plus de satisfaction, tous pays confondus (cf. mes auteurs 5 Étoiles). Comme il est préférable (surtout pour Les Gestionnaires de l'apocalypse) de respecter l'ordre chronologique de ses productions, j'indiquerai ici le premier de la série qui met en scène la mystérieuse F.

Michel Jobin n'a pas encore beaucoup publié, mais ses deux romans jouent avec nos nerfs de la bonne façon (cf. mon compte rendu de La Nébuleuse insième). En simplifiant outrageusement, je le distinguerais de Pelletier en disant que ce dernier se meut dans un univers affreusement possible, alors que Jobin nous plonge dans les magouilles actuelles de la finance.

Deux très bons romans aussi de Lionel Noël, le premier un thriller de politique-fiction autour du troisième référendum québécois; le second, un roman d'espionnage (conférence de Québec, 1943) comme il ne s'en fait presque plus, hélas! aussi bien documenté que les Le Carré et aussi dynamique que les Forsythe. Les critiques ont rapproché ce roman, eu égard au contexte historique et à la qualité, de La Femme de Berlin de Pauline Vincent, publié la même année (2004). On qualifie parfois d'historiques les thrillers de Noël et de Vincent, parce que les histoires ne se passent pas aujourd'hui et que les auteurs ont soigné le contexte politico-social.

Plus carrément historiques, les romans de Maryse Rouy et de Jean-Pierre Charland nous transportent à l'époque des troubadours (Rouy) ou cernent des moments historiques comme le début de la IIe Guerre Mondiale ou le terrorisme irlandais à la fin du XIXe siècle (Charland). Même si ces auteurs ont reçu des formations en histoire, la trame proprement policière n'est pas qu'un prétexte. A surveiller : Antoine Yaccarini, qui a écrit un seul roman, dont l'histoire se passe à Québec à la fin du XIXe siècle, et que les critiques ont encouragé.

D'autres auteurs développent leur intrique à l'époque actuelle mais dans un contexte géographique plus exotique. Jacques Bissonnette, par exemple, joue sur le péril islamiste; Mario Bolduc, pour sa part, nous conduit dans les mondes étranges de l'Inde ou des Tsiganes de Roumanie. Avec un oeil critique, particulièrement pour le sort que la guerre et la pauvreté imposent aux enfants, Camille Bouchard nous entraîne en Thaïlande, au Soudan et dans d'autres points chauds de la planète.

Plus classique, André Jacques a publié sa troisième aventure de l'antiquaire Alexandre Jobin, ex-agent des Services secrets canadiens. Intrigues corsées, personnages sympathiques et méchants perfides, écriture aisée : cet auteur nous promet de bons moments.

Faisant un peu bande à part dans le thriller politico-techno, Normand Lester et Corinne De Vailly ont fait leur possible pour que nous n'oubliions pas le verglas de 1998; bien documenté, le roman n'a pas séduit tout le monde par son intrigue. Plus divertissant quand même que les Dossiers noirs.

Bon écrivain, prolifique, mais un peu marginal par rapport à mon projet dans la mesure où ses thrillers scientifiques flirtent trop avec la science-fiction, et publiant surtout en France, Mornevert mérite néanmoins d'être découvert.

Mes recommandations
Jean-Jacques Pelletier L'homme trafiqué (Alire, 2000)
Michel Jobin La nébuleuse insième (Alire, 2005)
Lionel Noël Opération Iskra (Alire, 2004)
Pauline Vincent La femme de Berlin (Libre Expression, 2004)
Maryse Rouy Au nom de Compostelle (Québec-Amérique, 2003)
Jean-Pierre Charland La rose et l'Irlande (HMH, 2007)
Antoine Yaccarini Meurtre au soleil (VLB, 2008)
Jacques Bissonnette Badal (Libre Expression, 2006)
Mario Bolduc Tsiganes (Libre Expression, 2007)
Camille Bouchard Les démons de Bangkok (La Veuve noire, 2005)
André Jacques La tendresse du serpent (Québec-Amérique, 2008)
Normand Lester et Corinne De Vailly Verglas (Libre Expression, 2006)
Mornevert Passerelle Bankovski (Campoamor, 2005)

D'après mon expérience et celle des critiques que j'estime, voilà donc une quarantaine d'écrivains susceptibles d'agrémenter vos loisirs. Toute suggestion d'amélioration sera accueillie avec bienveillance : le domaine est si vaste que plusieurs doivent mettre l'épaule à la roue.

Michel Dufour

Mars 2009