Le club des polarophiles québécois
RP (Octobre 2011)
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Bank Arbaugh et Mack Steiner sont amis d’enfance
et collègues dans la police d’une ville non précisée dans L’Ohio. Malgré leur
amitié ils sont très dissemblables : Bank est un grand gaillard costaud,
intrépide, qui passe son temps sur le terrain alors que Mack est plutôt fluet
et introverti, lui préfère le travail de bureau. Un dimanche matin ils
reçoivent un appel concernant un enlèvement d’enfant : une fillette de 12
ans a disparue, on n’a retrouvé que son vélo. Cet évènement fait ressurgir une
autre affaire douloureuse : 7 ans auparavant, Jamie, la fille de Bank, a disparue
et on ne l’a jamais revue depuis. Le déroulement de l’enquête actuelle permet
au narrateur, le policier Mack, de faire de fréquents retours sur l’ancienne
affaire et de mettre en évidence la similitude de ces deux disparitions. Un
point commun va permettre la convergence des deux affaires : une même
empreinte digitale a été relevée sur des objets appartenant aux disparues.
La première chose qui se remarque à la lecture de ce bouquin est la qualité de l’écriture de Holden que les deux traducteurs ont parfaitement su rendre en français : grandes fluidité et limpidité de l’expression tout en ayant une grande puissance d’évocation. La seconde caractéristique de l’ouvrage est la qualité des deux personnages principaux. L’auteur ne tombe pas dans l’opposition simpliste entre un grand balèze pas très futé et un gringalet vif et malin. Les deux flics sont complexes et leurs personnalités très différentes sont décrites avec subtilité. Leur amitié est forte mais ambiguë : pas de tendance homosexuelle mais des comportements équivoques vis-à-vis de l’épouse de Bank. On comprendra mieux par la suite où tout s’éclairera.
L’auteur prend le temps de bien décrire les
lieux et les personnages. Nous ne sommes pas dans un thriller haletant, il y a
une certaine lenteur, Holden préférant privilégier la description des
atmosphères et la psychologie des personnages, à l’action débridée.
C’est avec talent, beaucoup d’intelligence et
une grande sensibilité que Holden traite d’un sujet aussi délicat que la
pédophilie. Ici, pas de bons d’un côté et des méchants de l’autre, on y trouve
seulement des hommes marqués par les épreuves subies, qui peuvent être à la
fois estimables et méprisables suivant les circonstances. Les quatre coins de la nuit est un excellent roman. Craig Holden est
un auteur confirmé, cinq de ses livres ont été traduits en français, mais il
reste curieusement assez méconnu dans le monde francophone malgré un talent
évident.
Ma note : 4,5 / 5