Le club des polarophiles québécois

Crise de panique (de Jason Starr)

JH (janvier 2012)


En un coup d'oeil

  • Date de publication : 2009 (Panic Attack).
  • Date de l'édition française: 2011 (Alphée, Outside Thrillers, 372p)
  • Genre: suspense.
  • Mots-clés: autodéfense, famille dysfonctionnelle, vengeance.
  • Personnage principal: Adam Bloom, psychologue de renom à New York.
  • Résumé et commentaire: sur Polar Noir.
  • Liste des romans de Jason Starr: sur Polar pourpres..

À mon avis

C'est mon premier contact avec cet auteur, que je ne connaissais pas. Pourtant, huit de ses romans précédents ont été traduits en français jusqu'ici, et les critiques sur les blogues sont en général très bonnes. Compte tenu de l'impression que m'a faite ce roman-ci, j'irai certainement faire une ou deux lectures rétrospectives en conséquence. (C'est maintenant fait. Voir ci-dessous).

Malgré une intrigue assez mince, ce roman se lit avec passion à cause de l'analyse fouillée des personnages et de la technique romanesque. Adam Bloom, un psychologue ayant réussi et qui vit une vie familiale en apparence correcte avec sa femme et sa fille adulte, se trouve confronté une nuit avec la présence de cambrioleurs dans sa maison. Au lieu d'appeler la police, il règle le problème lui-même: il tue l'un des deux malfrats et met l'autre en fuite.

Mais cela ne fait pas de lui le héros qu'il aurait espéré devenir. La police et les médias le soupçonnent de s'être défoulé et d'avoir abusé de sa force. Ce qui lui fait perdre des clients, lui donne une image de paria et accroît les tensions déjà présentes au sein de son couple et de sa famille. Mais surtout, le cambrioleur rescapé met au point un plan diabolique pour se venger et lui faire payer la mort de son pote. Ce roman, c'est essentiellement la mise en oeuvre machiavélique de cette vengeance et la descente aux enfers qui s'ensuit pour Adam.

L'auteur utilise systématiquement les narrations croisées pour nous faire voir de l'intérieur de chaque personnage le lent développement de l'intrigue. Et c'est joliment réussi. Originalité: chaque changement de point de vue (d'Adam, à sa femme, à sa fille et au meurtrier) chevauche une partie de l'intrigue déjà décrite avec le personnage précédent. On pourrait craindre que cette technique amène de la dilution et de la redondance, mais l'écueuil est brillamment évité. Au contraire, cela accentue le relief avec lequel est exposé le climat toxique et délétère qui s'installe au sein de la famille.

Même si les personnages sont tous vus de l'intérieur, aucun d'entre eux n'est vraiment sympathique, ce qui place le romancier à distance, en position critique par rapport à l'univers bourgeois dans lequel évoluent ses personnages. L'ironie est d'autant plus marquée qu'Adam, pourtant spécialiste des comportements humains, s'avère totalement incompétent à gérer ses propres problèmes familiaux. De là à y voir un coup de griffe à la profession, il n'y a qu'un pas.

Un excellent moment de lecture, que je vous recommande chaudement.

Ma note: 4,5 / 5


Romans précédents:

Comme annoncé, je suis allé lire, dans la foulée, deux des romans précédents de Jason Starr: Mauvais karma (2005) et La ville piège (2008). Les deux romans jouent sur des thèmes similaires: la descente aux enfers d'un personnage principal, archétype du loser, qui, par lâcheté, alcoolisme, manque de jugement, paranoïa ou manque de contrôle, a le don de se mettre dans les pires situations et de s'y enferrer par sa propre faute. Le tout dans un New York bien noir à la Lawrence Block. L'expérience du personnage principal résolument antipathique est quelque peu déstabilisante, d'autant plus que les deux romans sont narrés à la première personne: aucune identification du lecteur n'est donc possible, et Starr joue là-dessus.

Cela dit, malgré ses prix, La ville piège est à mon avis raté alors que Mauvais karma est une réussite. Dans le premier cas, l'intrigue se traîne et finit en queue de poisson, en laissant plein de fils en l'air. Dans le second, nous avons une histoire solide, développée à petites touches à la Finder et une finale à la fois logique et totalement inattendue. Mes notes: 4/5 pour Mauvais karma et 2/5 pour La ville piège.

Bref, mon idée n'est pas encore arrêtée sur cet auteur inégal, qui semble capable du meilleur et du pire.