Le club des polarophiles québécois

La forêt des mânes (de Jean-Christophe Grangé)

JH (octobre 2009)


En un coup d'oeil


À mon avis

Je suis un fan de Jean-Christophe Grangé, à qui j'ai consacré, sur ce site, une entrée cinq-étoiles. Son dernier roman reste dans la lignée des précédents, explorant les extrémités que peut atteindre l'humain dans le Mal. On y retrouve les ingrédients habituels de la manière Grangé: des cadavres particulièrement sanglants (et même, ici, dévorés); des flirts qui oscillent entre le surnaturel et la science; les racines du crime actuel qu'il faut déterrer dans les décennies précédentes; et l'exotisme du grand voyageur (qui nous amène ici en Amérique centrale, puis en Argentine). Mais, même si Grangé demeure un écrivain de grand talent, l'habitude qu'il semble avoir prise de sortir son roman habituel chaque automne semble lui causer une certaine fatigue.

Il a bien fait ses devoirs: recherches fouillées en paléo-anthropologie et en génétique et recherches sur le terrain pour étoffer ses (nombreux) décors car, comme c'est son habitude, on voyage beaucoup dans ses romans. On reconnaît le grand reporter qu'il fut dans une autre vie et, comme il écrit bien, ses nombreuses descriptions passent quand même la rampe.

Mais il semble avoir eu du mal à ficeler tout cela ensemble. Le roman souffre de partir dans trop de directions différentes. C'est à la fois l'étude psychologique de Jeanne, son personnage principal, dont la vie ratée prend soudain un sens avec cette enquête, les développements didactiques en anthropologie des sociétés préhistoriques, en psychologie de l'autisme et des personnalités multiples, la géopolitique de l'Amérique latine. Et l'intrigue n'est pas suffisamment serrée pour charpenter solidement tout cet édifice de 512 pages: entre deux meurtres, Jeanne va faire ses classes en consultant un expert, qui la renvoie à un autre expert, qui la renvoie à un troisième. Et comme tous ces experts habitent des pays différents, on voyage. Et je te décris l'hôtel; et je te décris le bidonville; et puis le village perdu dans la jungle. Et le coup des personnalités multiples, ce n'est pas vraiment de quoi révolutionner le genre.

Comme Grangé, c'est Grangé, le roman se laisse quand même lire sans trop rechigner. Mais je me demande s'il n'est pas en panne d'inspiration, se rabattant sur a vieille recette pour sortir son roman annuel. J'avais déjà percu un déclin avec l'avant-dernier, Miserere. Cette nouvelle mouture semble confirmer l'impression. Pas mauvais, mais certainement pas du calibre de La ligne noire ou du Serment des limbes.

Ma note: 3,5 / 5