Le club des polarophiles québécois

L'ombre d'Edgar Poe (de Matthew Pearl)

MD (juin 2009)


En un coup d'oeil


À mon avis

Il y a quelques années, j'avais beaucoup aimé Le Cercle de Dante (Robert Laffont, 2004), et je m'étais promis de sauter sur le prochain roman, son deuxième, de Matthew Pearl. La pochette est d'ailleurs très invitante : soir nuageux, escalier en fer forgé, noir et blanc favorable aux silhouettes, atmosphère qu'on retrouve indéniablement dans plusieurs récits d'Edgar Poe.

Qu'est-il donc arrivé entre le 27 septembre 1849, où Poe quitte Richmond pour Baltimore, et le 3 octobre où il est retrouvé hagard, malade, blessé, au 4e Bureau de scrutin de Ryan, avant de mourir au Washington College Hospital, le 7 octobre? C'est ce que veut savoir le jeune avocat Quentin Clark, quitte à partir à la recherche en France de celui qui a servi de modèle au Chevalier Dupin dans les aventures policières de Poe, pour l'aider à élucider le mystère qui entoure les derniers jours du célèbre écrivain.

L'idée n'est pas mauvaise. En janvier, j'ai rendu compte des Histoires secrètes de Sherlock Holmes de René Reouven : une nouvelle d'une centaine de pages, Le Détective volé (1988), reprend La Lettre volée et Le mystère de Marie Roget d'Edgar Poe : Holmes enquête à Paris sur ce vol de lettre auquel serait mêlé le Chevalier Dupin; puis, à Philadelphie et à Baltimore, il tente d'éclaircir la mort de Poe dans des circonstances mystérieuses. La nouvelle est dense, intéressante et amusante. Qu'en est-il du gros roman de Pearl?

Et bien, en toute conscience de commentateur scrupuleux, je ne peux pas vraiment répondre à cette question. J'ai essayé plusieurs fois, avec une très bonne volonté, de traverser le bouquin; je n'ai pas pu franchir la moitié : comme c'est plat et insipide! C'est pratiquement incroyable qu'on ait affaire ici à l'auteur du Cercle de Dante. On dirait un cégépien moyen, mais qui aime la littérature, s'essayant à un premier roman : il vieillit un peu son héros (Clark a 27-28 ans, et non pas 17-18), mais lui prête des réactions et, pour tout dire, une vie sentimentale d'ado attardé. Bon! Je veux bien admettre que ces grands lymphatiques doivent bien exister, et que d'aucuns doivent leur trouver un certain charme; dans un polar, cependant, les introspections stériles, les répétitions inutiles, les descriptions minutieuses de chiures de mouches, les multiplications d'invraisemblances, les personnages caricaturaux, le tournage en rond jusqu'à l'étourdissement, tout cela finit par décourager les plus grands efforts. C'est vraiment l'impression que j'ai eue, et qui s'incruste obstinément : c'est comme si l'auteur avait repris un vieux manuscrit qu'il avait écrit il y a des lustres, l'avait quelque peu retouché, et avait cédé aux éditeurs qui espéraient profiter de la vague du Cercle de Dante, très bon roman, je le répète, et où la dimension littéraire ne servait pas de caution à une procédure d'enquête sans grand intérêt.

Ma note: 2/5