Le club des polarophiles québécois

Savages (de Don Winslow)

JH (août 2011)


En un coup d'oeil

  • Date de publication : 2010 (Savages).
  • Date de l'édition française: 2011 (Éditions du Masque, 326p).
  • Genre: roman noir, polaroïde.
  • Mots-clés: guerre de gangs, otage, ménage à trois.
  • Personnages principaux: Ben, Chon et Ophelia, petits producteurs de marijuana.
  • Résumé et critique: ici et .

À mon avis

Ce roman est un inclassable, tellement il est original par son style. C'est même à se demander si c'est un polar car, s'il n'y manque pas de cadavres, il n'y a pas d'enquête et encore moins de policier, tous les assassinats s'effectuant dans le cadre d'une guerre de gangs: un petit et un gros.

Ben, l'intello écolo, Chon, l'ex-commando et Ophelia la nymphomane forment un improbable ménage à trois près de San Diego. Quand ils ne sont pas occupés à baiser, à surfer ou à jouer au volleyball de plage, ils produisent une variété très pure de marijuana, fort prisée des amateurs. Cette petite vie tranquille est bouleversée quand le Cartel de Baja décide d'annexer leur petite business. Il faut dire que ces traficantes mexicains ont un argument de poids: il retiennent en otage Ophelia, qu'ils ont kidnappée pour faire pression sur Ben et Chon.

Le reste du roman est l'histoire de la bataille qu'entreprennent Ben et Chon pour sortir Ophelia des griffes du Cartel et se faire la malle ensuite. À partir de là, l'intrigue est intéressante, mais prévisible: c'est une version moderne sous stéroïdes de l'histoire de David et Goliath. Ce n'est donc pas de là que vient l'intérêt du roman.

Son originalité vient d'abord du style d'écriture très personnel de Winslow. Le premier chapitre tient en deux mots: Fuck you. Cela donne le ton. Écriture syncopée, oscillant entre le storyboard cinématographique, l'envolée lyrique, l'écriture automatique et le monologue intérieur argotique: vous n'avez jamais rien lu de semblable! On sent le procédé par moments, mais il faut reconnaître que le style est parfaitement adapté aux personnages et punche littéralement le lecteur. Avec un humour déjanté qui pourrait rappeler Carl Hiaassen si le propos de fond n'était pas si sérieux.

Les personnages ensuite. Aussi bien du côté du trio principal que des mafieux du Cartel, l'auteur évite soigneusement la caricature et façonne une galerie de personnages hors normes, excessifs mais parfaitement crédibles et fortement différenciés.

On aime ou on n'aime pas. Personnellement, le roman de mafiosi n'est pas ma tasse de thé, pas davantage que les histoires de dealers (la spécialité de Winslow, à ce que j'ai compris). Mais je m'incline devant la puissance romanesque et l'originalité d'écriture de ce polaroîde. Bonne lecture!

Ma note: 4,5 / 5