Le club des polarophiles québécois

Totally killer (de Greg Olear)

JH (septembre 2011)

(Voir la critique du même roman par Raymond - juillet 2011)


En un coup d'oeil

  • Date de publication : 2009 (Totally Killer).
  • Date de l'édition française: 2011 (Gallmeister, 300p)
  • Genre: polar sociologique.
  • Mots-clés: chômage. années 90, conspiration.
  • Personnages principaux: Taylor Schmidt, jeune ambitieuse; Todd Lander, son coloc et amoureux transi.
  • Résumé et commentaire: ici.

À mon avis

Ce roman, première oeuvre d'un nouvel auteur américain, reprend une idée du Couperet, de Donald Westlake: créer des emplois en liquidant ceux qui les occupent déjà. Mais ce n'est pas un plagiat, car les registres sont fort différents. Là où le personnage du Couperet agissait seul, dans un cadre physique et temporel assez neutre, ici, c'est une organisation bien campée dans le New York des années 1990.

Pas de gros suspense. On sait dès le départ que Taylor, l'héroïne du roman, est destinée à mourir et que tous les gestes qu'elle va successivement poser tout au long du roman l'amèneront, comme dans une tragédie grecque, à sa destinée finale. Et la mécanique de la mystérieuse société Quid Pro Quo, déjà déflorée par la quatrième de couverture, apparaît assez tôt dans le roman. L'intérêt de ce roman ne consiste pas à savoir ce qui va se passer, mais comment l'enchaînement des événements va y conduire. Et à partir de là, c'est impeccablement ficelé et ça progresse sans temps morts.

Mais l'originalité du roman repose d'abord sur ses deux personnages principaux. Todd, acteur raté mais bon bougre, qui cherche désespérément à joindre les deux bouts, notamment en prenant une coloc qu'il passera tout le reste du roman à avoir envie de baiser sans oser faire l'approche; et Taylor, nymphomane ambitieuse, prête à tout - et notamment à se servir inconditionnellement du désir qu'elle suscite chez tous les mâles - pour accéder à la réussite sociale et qui, alors qu'elle collectionne les coups d'un soir dans son lit, se refuse systématiquement à Todd, puisqu'il est son meilleur ami.

L'autre aspect qui rend ce roman noir jubilatoire, c'est son style à l'humour décapant qui sert à merveille une reconstitution minutieuse des années 90 (la guerre du Golfe, les débuts d'Internet, la récession, etc.) doublée d'une critique au vitriol de la société américaine (l'ascension sociale à tout prix, les déboires de la génération X et sa haine des babyboomers, le chacun pour soi, les théories du complot, etc.). Olear mange à tous les râteliers, mais avec une distance humoristique grinçante qui atténue la noirceur désespérante du propos.

Un auteur à surveiller, certainement. Son prochain livre est annoncé: Fathermucker. Tout un programme!

Ma note: 4,5 / 5