Le club des polarophiles québécois

La vendetta Lazare (de Robert Ludlum et Patrick Larkin)

MD (avril 2009)


En un coup d'oeil


À mon avis

Même si Peter Howell, l'agent britannique, le déclare avec une certaine ironie : Notre rôle n'est pas de poser des questions, c'est d'agir et de mourir, c'est suffisant pour comprendre que nous ne sommes pas dans un roman de détection. Le lecteur apprend d'ailleurs assez rapidement la nature du complot et les principales manipulations. C'est un thriller d'action, simple malgré l'abondance de personnages, à la structure linéaire sans trop de rebondissements, qui met en scène des méchants très méchants et des bons bien bons, ni complexes ni développés dans la mesure où nous ne les connaissons qu'à travers leurs actions vengeresses ou humanitaires; bref, de quoi faire un bon film à effets spéciaux avec une vedette sympathique. Comme Mat Damon incarnant Jason Bourne.

La vendetta Lazare est le quatrième roman de la série Réseau Bouclier ( le 3e traduit, mais le 4e écrit). Le premier, Opération Hadès, a été publié en 99, deux ans avant la mort de Robert Ludlum, mais il semble avoir été complété par Gayle Lynds. On y fait la rencontre du héros récurrent Jon Smith et de son vieux camarade de combat Peter Howell, probablement du MI-6. On retrouve Smith dans Le Pacte Cassandre, 2001 (roman achevé par Philip Shelby). Puis, Gayle Lynds termine Le Code Altman (2003) et Patrick Larkin met la main à La Vendetta Lazare (2004), puis au Vecteur Moscou en 2005. A ce rythme, Ludlum va écrire plus de livres après sa mort qu'au cours de sa vie.

De son vivant, Ludlum, né en 1927, a publié une trentaine de romans d'espionnage, commençant par L'Héritage Scarlatti en 1971. J'en ai lu une dizaine dans les années 80, et je suis passé à autre chose; le taux de satisfaction avait décru : peut-être parce que d'autres auteurs dans le même genre se sont manifestés; peut-être que j'ai eu besoin de fréquenter d'autres genres ou de vivre des émotions plus fortes ou plus rares. Peut-être une overdose d'idéologie américaine primaire supportée par la bonne conscience des héros. Aujourd'hui, les Pelletier, Le Roy, Fawer me semblent mettre plus de chair sur le squelette.

Quoi qu'il en soit, j'ai retrouvé dans La Vendetta Lazarre les qualités et les défauts qui caractérisent les romans de Ludlum et de ses successeurs. Jolis paysages rapidement esquissés, bon rythme qui nous épargne toute longueur, intrigue internationale quasi vraisemblable, écriture aisée. Un bon cinéaste saura capter les aspects originaux du Nouveau Mexique et le pittoresque quartier parisien du Marais; Ludlum aimait bien les grandes capitales européennes. D'un autre côté, les personnages sont dépourvus d'épaisseur psychologique et sociale : hommes et femmes d'action, ils sont d'un degré ontologique à peine supérieur aux robots. La dimension techno est moins recherchée que chez Crichton. C'est sans doute un peu injuste, mais ce qui était assez neuf dans les années 70, à force d'être répété, est devenu conventionnel, donc attendu; par exemple, partager la vie intime des Grands de ce monde comme celle du Président des États-Unis. Après Clinton, il n'y a plus rien là.

Donc, un divertissement de bon aloi, mais qui laissera peu de traces.

Ma note: 3,5 / 5