Robe de marié | Cadres noirs | Alex |
RP (Raymond Pédoussaut) - juin 2010
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Non ! il n'y a pas de faute dans le titre ! C'est bien Robe de Marié et non Robe de Mariée (masculin et non féminin). Il faudra atteindre la fin du livre pour comprendre ce titre et je ne vais pas, à ce niveau, en révéler le sens … Ce serait vraiment dommage !Ce livre est difficile à résumer sans dévoiler la mise en scène qui est d'une redoutable efficacité. Aussi je ne parlerai que de la première partie.
Sophie est perturbée par la mort de son mari. Elle a quelques oublis, des trous de mémoire. Ce ne serait pas très grave si ces incidents ne devenaient de plus en plus nombreux et de plus en plus alarmants.
La gravité des incidents devient telle qu'elle est impliquée dans des affaires de meurtres dont elle ne garde aucun souvenir. Petit à petit, elle sombre dans la folie. Pour échapper à la prison ou à l'internement, elle se lance dans une cavale sans fin. Malgré sa folie elle fait preuve de beaucoup de ressources et réussit à refaire sa vie sous un nouveau nom en se mariant avec un jeune homme très discret et incolore.
Bon, en lisant ça j'imagine que les aficionados des thrillers purs et durs, bien sanglants, ne vont pas avoir du tout envie de lire ce livre ou s'ils l'ont entamé, ils vont le laisser tomber au bout de 10 pages ! Eh bien, ils auraient tort ! Car c'est bien un vrai thriller tendu, intense et non une étude psychologique sur le mal-être d'une femme. Par la suite vous serez surpris et même déstabilisé (peut être moins maintenant que je vous ai prévenu), et après ça vous ne pourrez plus lâcher le livre qui a failli vous tomber des mains !
Le livre est construit en 3 parties, bien nettes, bien séparées et tout l'intérêt vient de cette construction.
C'est quasiment chirurgical ! Et c'est merveilleusement bien orchestré ! C'est à la fois très simple et extrêmement efficace, bien loin de ces livres formatés où il faut une scène d'action toutes les 15 pages, un scène de sexe torride toutes les 30 pages et un retournement invraisemblable toutes les 50 pages.
Les personnages sont forts et typés, bien que leur description dans la partie En un coup d'œil laissent penser le contraire. C'est vraiment trompeur !
C'est un livre sur la manipulation et à la fin le lecteur s'aperçoit qu'il a été lui aussi manipulé par un auteur très habile … mais il ne lui en veut pas !
Je trouve que j'en ai trop dit, même si c'est peu, mais j'ai voulu éviter que certains abandonnent prématurément cet excellent bouquin.
J'ai pensé à certains films d'Alfred Hitchcock à la fin de cette lecture.
Ma note: 5 /5 et Coup de coeur.
Robe de marié | Cadres noirs | Alex |
JH (octobre 2010)
En un coup d'oeil
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À mon avis
C'est Raymond Pédoussaut, notre collaborateur français occasionnel, qui a attiré mon attention sur Pierre Lemaître, avec sa critique très favorable de Robe de marié (voir ci-dessus). Cadres noirs, le troisième roman de cet auteur, est une belle découverte.
Au départ, un cadre au chômage, prêt à tout pour retrouver un emploi, après quatre ans d'espoir, puis de désespoir. L'occasion se présente: une grosse firme, dans le cadre d'un jeu de rôles destiné à sélectionner du personnel, retient sa candidature pour participer à une simulation de prise d'otages. Alain Delambre se prépare minitieusement, risquant tout ce qui lui reste pour se procurer un avantage à la prise de décision. Mais, le jour venu, tout dérape et commence pour lui une longue descente aux enfers, digne de Douglas Kennedy, suivie d'une lutte de David contre le Goliath que représente la grosse multinationale.
Le contexte, celui d'un cadre au chômage acculé, nous fait immédiatement penser à deux illustres prédécesseurs: Chasseur de têtes, de Michel Crespy (Grand prix de littérature policière 2001) et Le couperet, de Donald Westlake (porté à l'écran par Costa-Gavras). Mais Cadres noirs, sur des brisées similaires, suit sa propre logique. Le roman est divisé en trois parties: Avant, centré sur le travail de préparation de Delambre; Pendant, narré par Fontana, le méchant exécuteur des basses oeuvres de la multinationale; et Après, où l'on revient à Delambre pour l'accompagner dans sa mission quasi-suicidaire de survie.
Ce roman a des visées sociales. Il dénonce l'inhumanité des grosses entreprises et de leur département de RH, uniquement préoccupés de profits et d'image publique et prêts à toutes les manipulations pour parvenir à leurs fins, sans aucun égard pour les employés, qui ne sont que des pions sur un échiquier. Lemaître les varloppe avec une allégresse jubilatoire qui, pour être quelque peu convenue, n'est pas moins réjouissante.
Il démontre ensuite une grande maîtrise dans la façon de gérer à la fois la psychologie de ses personnages (qui tient du roman noir et de suspense) et la progression de l'intrigue (plus proche du thriller à la vitesse du TGV, surtout dans la dernière partie). Il y réussit en nous décrivant de façon poignante les états d'âme de Delambre (et notamment son amour désespéré pour sa femme et ses deux filles) mais en faisant l'impasse sur ses intentions, sur son plan de match qui, mélange de machiavélisme et d'improvisation, se dévoile au compte-gouttes. Bon, David, dans sa lutte titanesque contre Goliath, a besoin d'un ou deux coups de pouce de l'auteur, mais l'intrigue demeure rigoureusement ficelée, sans un poil qui dépasse. La finale douce-amère, morale sans être moralisante, est splendide, évitant à la fois l'écueil du rose bonbon hollywoodien et le noir déprimant. L'écriture, nerveuse et caustique, sans longueurs inutiles ou presque, sert fort bien ce bouquin que je vous recommande sans hésitation.
Ma note: 4,5 / 5 et Coup de coeur.
Robe de marié | Cadres noirs | Alex |
RP (Mai 2011)
En un coup d'oeil
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À mon avis
Le Commandant de
police Camille Verhœven est de retour ! C’est le héros du premier roman de
Pierre Lemaitre, Travail soigné. La
fin de cet épisode a été dramatique pour lui : il a perdu sa femme et le
bébé qu’elle portait. Il a repris son travail mais il ne veut plus s’occuper de
disparition, il ne prend plus que des affaires secondaires ou des affaires avec
des morts bien morts mais surtout pas de kidnapping. Hors voici que son
supérieur le sollicite sur une affaire d’enlèvement parce que personne d’autre
n’est disponible pour l’instant. Il renâcle mais finit par accepter à condition
d’être rapidement relevé par un autre policier dès que l’on en trouvera un de
libre. Évidemment il ne lâchera jamais cette enquête, il s’y consacrera
totalement.
Le
commandant Verhœven est un policier particulier, loin de l’archétype du flic
que l’on trouve dans les films ou les romans du genre. Il est chauve et il a la
taille d’un enfant de 12 ans : 1,45 mètre ! C’est un petit homme mais un
grand policier.
On lui confie donc l’enquête sur un enlèvement. Une
jeune femme a été attaquée et embarquée dans une voiture. Il y a un seul
témoin. On ne connaît l’identité ni de la victime, ni du ravisseur. La première
partie du livre décrit l’enlèvement et la séquestration. C’est la victime qui
raconte son martyre, enfermée dans une cage suspendue dans laquelle elle ne
peut ni se lever ni s’allonger. Les rats rodent autour attendant qu’elle soit
assez faible pour l’attaquer. Les policiers dirigés par le commandant Verhœven vont-ils la trouver et la sauver d’une mort horrible
? C’est le suspense de cette première partie.
Comme
dans son livre précédent Robe de marié,
le livre se compose de trois parties, sobrement intitulées I, II, III. Avec
Pierre Lemaitre une nouvelle partie n’est pas seulement la suite de celle
d’avant, c’est un contre-pied de la précédente. Il y a toujours un effet de
surprise, une vision tout à fait inattendue des évènements. C’est pour cela
qu’il est difficile de résumer ses bouquins sans dévoiler cet effet de surprise
qui fait l’intérêt de ses livres. Aussi, comme dans Robe de marié que j’ai chroniqué
précédemment, je ne parlerai que de la première partie pour préserver cet effet
recherché par l’auteur. Sachez simplement que c’est très bien construit et que
plus on avance dans la lecture, plus l’intérêt et le suspense grandissent. Pierre
Lemaitre prend plaisir à nous mener en bateau en nous présentant une vision des
évènements, puis une autre, vue d'un angle différent, tout en préservant
l’unité de l’histoire. C'est fait avec astuce et talent, loin des grosses
ficelles que l'on trouve chez des auteurs spécialistes du rebondissement improbable. On découvrira ainsi qu’Alex n'est pas n'importe qui !
Ma note : 4,5 / 5