Le club des polarophiles québécois

La petite fille de ses rêves (de Donna Leon)

MD (mars 2012)

Voir aussi mon topo Valeurs sûres sur cette romancière.


En un coup d'oeil

À mon avis

C'est la 17e enquête du commissaire Brunetti et de son équipe. En réalité, il s'agit de deux enquêtes : une porte sur le mentor d'une sorte de secte qui a l'air de chercher à extorquer de jeunes personnes plutôt naïves. L'autre sur l'élucidation de la découverte dans un canal d'une jeune Gitane d'une douzaine d'années, apparemment noyée. Deux bonnes enquêtes en perspective qui, se dit-on, vont sans doute se croiser quelque part.

Depuis trois ans, cependant, (depuis, surtout, Requiem pour une cité de verre), les amateurs de Donna Leon ont remarqué une nouvelle orientation des romans de cette sympathique romancière. La famille Brunetti a toujours eu une certaine importance, surtout les relations entre Brunetti et Paola, son épouse, sa belle-mère et son mystérieux beau-père, qui fournit souvent des informations de la plus haute importance à son gendre, à condition qu'on ne lui demande pas ses sources. Dorénavant, c'est l'aspect psychologique, sociologique et éthique qui prennent le plus d'importance. Ce qu'on perd, c'est l'aspect mystérieux du problème initial, la subtilité de l'enquête et l'élucidation intelligente. Ici, par exemple, on ne découvre la jeune noyée qu'à la 125e page du chapitre 12, et rien ne dit que c'est un meutre. Avant ça, Brunetti cherche un peu à identifier un éventuel escroc religieux; il passe bien du temps pour trouver un croyant, rencontre un vieux prêtre alors qu'il voulait voir quelqu'un d'autre, visite une église et, heureusement, dîne en famille, boit quelques Prosecco pour se remettre d'une prédication religieuse et s'attarde dans un café avec Vianello, ce qui met un peu d'action dans le récit. Finalement, il laissera la senorita Elettra ramasser les informations sur le supposé escroc, qui finira par disparaître des préoccupations de tout le monde.

Quant à la jeune noyée, on ne pourra pas pousser l'enquête trop loin, à cause des implications politiques, mais on aura droit à une réflexion intéressante sur la place des Roms dans une société qui se veut civilisée.

C'est bien écrit, comme d'habitude, mais j'attire votre attention sur les nombreux commentaires qui apparaissent sur le site Babelio que j'ai indiqué en référence : les gens parlent d'un peu tout : la cérémonie émouvante à la mort de la mère de Brunetti, les enfants de Brunetti qui grandissent avec sagesse, la bonne collaboration entre Brunetti et les carabiniers, l'ambiance agréable de Venise…

Tout ça est assez vrai mais un lecteur de polar s'attend à plus; car l'enquête comme telle est vraiment mince et finit en queue de poisson. Brunetti, et je ne le blâme pas, trouve plus intéressants les repas préparés par sa dynamique épouse, et je vous suggère d'ailleurs deux Donna Leon à ne pas manquer et qui manifestent bien ses intérêts actuels : Brunetti passe à table (avec Roberta Pianaro) (Points, 2011), agréable livre de cuisine italienne, et, pour les amateurs d'opéras : Le Bestiaire de Haendel (Calmann-Lévy, 2012).

Ma note: 3/5