Le club des polarophiles québécois

Mémoire coupable (d'Ann Perry)

MD (août 2009)

Voir pourtant mon entrée 5-étoiles pour cette auteure, habituellement excellente.


En un coup d'oeil


À mon avis

Peut-être ai-je été trop gâté par le talent de Anne Perry dans le passé, même dans un passé récent (cf. Buckingham Palace Gardens), _ toujours est-il que ce dernier-né est bien décevant. C'est long, répétitif, préfabriqué, et le vide de l'histoire est rempli indûment de considérations psychologiques et éthiques d'une banalité étonnante.

Habituellement, l'équilibre entre l'action et la dimension personnelle des principaux personnages est réussi. Dans ce cas-ci, ce n'est pas le cas pour la bonne raison que la dynamique tend vers zéro : que ce soit Monk, Hester, Orme, Squeaky, Sutton ou Claudine qui se perd dans les méandres londoniens à la recherche de renseignements, c'est toujours la même improvisation plus ou moins récompensée par des heureux hasards. Si c'était un film, on pourrait le réaliser en studio. D'où la nécessité de meubler le vide par des introspections où chacun se sent coupable, honteux, désolé, maladroit, mais de bonne volonté. Perry est toujours capable de nous faire sentir le port et les bas-fonds londoniens, mais c'est insuffisant pour compenser l'inexistence d'une intrigue bien pensée et bien menée. Les personnages secondaires n'ont pas la densité de ceux qu'on retrouve dans l'univers de Thomas Pitt. Les truands se ressemblent tous; les amis de Hester sont à peine esquissés; des personnages assez importants (Ballinger) peu développés.

Trop peu crédibles également : la finale heureuse; le pervers, à peine soupçonné, qui se met à table; la rencontre hasardeuse de Claudine, qui aura de lourdes répercussions, et qui pourtant, en soi, ne signifie pas grand chose de décisif; la manœuvre tortueuse de Rathbone auprès de Cribb. Cet étrange Cribb d'ailleurs qui, secrétaire de Ballinger (p344), se retrouve soudain secrétaire de Rathbone (p 416) !

Bref, même pour les lecteurs qui se sont attachés à Hester, à Monk, et à Rathbone depuis des années, et qui sont donc en mesure d'apprécier la dimension personnelle du drame qui affecte ces grands personnages dès le début du roman, et qui aurait pu servir de toile de fond à une enquête subtile agrémentée de quelques adroits rebondissements, le rythme est si lent, l'enquête si peu crédible, et le dénouement si convenu, qu'il est pénible de traverser cette longue épreuve.

Ma note: 2,5 / 5